Confusion entre PSI et Open Data ?

Confusion entre PSI et Open Data ?

La Commission européenne parle aujourd’hui de stratégie Open data1 dont le kapstok juridique se matérialise par la directive Public Sector Information (en voie de révision).

Sous des vocables différents induit-elle un changement d’orientation politique ?

Qu’entend-on par Public Sector Information ?

Le terme "information" utilisé dans le titre de la directive européenne de 2003 se rabat singulièrement sur celui de 'document'. Mais la portée de "document" est extrêmement large et variée (considérant 11). Large parce que tous les supports sont inclus. Varié parce que tous les domaines sont potentiellement visés.

À l'époque, l’UE s’adressait aux autorités publiques parce qu’elles détiennent des informations sur à peu près tout . Dès qu’un pan de vie se réglemente ou qu’une offre publique de service s’organise, il génère une collecte de données, un traitement, un stockage, une communication ...toujours liés à la finalité du service public.  

Un service public ne peut exercer ses prérogatives que dans le cadre de ses missions, elles même réglementées. La communication des documents est généralement réservée aux particuliers sur qui porte l’information et dans certains cas notoires (instituts géographiques, météo…) une diffusion vers des groupes cibles assimilées à des clients (les maisons d’éditions, les journaux, les analystes financiers...).

L’objectif principal de la directive 2003/98 est de mettre à disposition ces documents auprès de tiers, hors la relation administré- citoyens / entreprises. Le plus de documents possible cela va sans dire. Pas d’obligation formelle mais déjà une volonté de déclasser, de mettre officiellement dans le domaine public des informations massives (par opposition aux données individuelles) qui sont déjà publiques mais trop discrètement et d’une maniabilité peu propice à la réutilisation.

Ainsi des règles "minimales" balisent désormais la réutilisation des documents par des entreprises puisque ce sont bien elles qui sont les bénéficiaires potentielles de la directive inscrite dans la promotion du marché intérieur (considérant 5). Ce qui n’empêche pas une réutilisation par des individus qui n’ont pas de prétention commerciale.

Parmi les 5 principes fondateurs (voir présentations au colloque de décembre 2007...), la préférence au format électronique2 est indéniable pourvu qu’il soit suffisamment standardisé, réexploitable et convivial.

L’autre enjeu était de faciliter la recherche des documents, d’où l'émergence de portails routeurs qui fleurissent dans plusieurs Etats et villes.

 

Qu’entend-on par Open Data ?

Dans le mouvement Open Data, terme importé beaucoup plus tard (2010...) des anglo-saxons et des USA (qui n’ont pas de contraintes européennes), ont été brassés tous les concepts d’open governement , openness, E-democracy… malencontreusement répercutés dans le grand public sans connaitre les avancées de nos services publics européens, de l' évolution de nos gouvernements. Citons les développements d’accessibilité des citoyens à leurs propres données par l’électronique (en Belgique: mon dossier , my minfin , my pension, private search de la BCE)3 les applications servant la simplification administrative par échanges de données entre services publics, les consultations sur des projets de textes réglementaires, les mécanismes de vote électronique (E-democracy).

► Data ? pourraient être synonyme de documents, en plus restreint. Une donnée en statistique est une partie d’un document, une donnée brute qui constitue un embryon d’information à construire.

► Open ? "libéraliser enfin les données!". "L'ouverture des tiroirs des services publics où se cachent des trésors d'informations" sont des slogans essentiellement allégoriques. Comme dit plus haut, beaucoup de données sont libres mais c’est plutôt la manière de les offrir qui doit être améliorée. Le travail de stimulation, d’intéressement des producteurs de données en est encore à ses débuts. Il leur faut des moyens, des idées, des demandes, des avantages réciproques dès lors qu’ils agissent en marge de leurs missions premières. 

►Si l'objet de la directive PSI était de promouvoir la prospérité des entreprises et l'accroissement des emplois, celui d’open data semble également s'axer sur l'accessibilité des citoyens à de l'information publique au profit de combinaisons (mash up) personnelles, spontanée. Une des difficultés d'accession à des volumes importants d'informations est sans doute le prix à payer. La frontière pourrait également se tracer sur ce critère de données gratuites ou monnayées.

►Par ailleurs, la directive PSI n'envisage que les données détenues par des autorités publiques désormais tenues de respecter certaines règles de non-discrimination, de transparence et d'harmonisation. Toutes les données des entreprises peuvent également entrer dans la sphère de l'open data, mais ne sont pas soumises à ces mêmes et bonnes règles PSI; par exemple, une entreprise donnera ses points de vente à des agences publicitaires en exclusivité, sans aucune obligation de transparence.

Ceci étant dit, toutes les discussions à propos de protection des données personnelles, de licence standard et simplifiée, de droits d’auteurs, de redevance juste ont été menées dans le cadre de la transposition de la directive PSI… à peu près dans les mêmes termes des deux côtés de l’Atlantique où l'open data est l'expression en vogue.

D. De Vos4

décembre 2011

 

Notes:

[1] Voir le communiqué de Nelly Kroes "Digital agenda turning governement data into gold" du 12 décembre 2011.

[2] La proposition de directive modifiant la directive 2003/ 98 entend remplacer  les termes "formats électroniques" par "lisible par machine  et en les accompagnant de leurs métadonnées".

[3] Voir la brochure 'my glass house web' , disponible sur www.chancellerie.belgium.be.

[4] Ce remue méninge n’engage que son auteur...